Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Ciné-Club des Esthètes de la Rue Truffaut
16 mars 2017

Séance 23 - Elephant Man

Elephant Man / Eraserhead

Comparaison dans Dictionnaire du cinéma de Jacques Lourcelles :

"Ce deuxième film de David Lynch est à certains égards le contraire du premier. Eraserhead donnait une force réaliste à une histoire extravagante et fantastique. Elephant Man confère une ampleur fantastique à une intrigue réaliste tirée de la biographie d'un personnage réel qui a inspiré divers ouvrages littéraires, scientifiques et dramatiques. (Par ailleurs, John Merrick écrivit son autobiographie, d'où Lynch a repris l'explication controversée de l'origine de son surnom et de ses maux, à savoir l'accident maternel).

Le héros de Eraserhead et son "bébé" devenaient au fil du récit de plus monstrueux et insupportables à voir. Le personnage de Elephant Man s'humanise progressivement au cours du récit (et surtout c'est le regard du spectateur sur lui qui ne cesse de s'humaniser ; et dans cette évolution tient l'essentiel du message du film)."

Un film pas si classique

S'il est considéré comme le film le plus grand public de Lynch, Elephant Man contient bien pourtant toutes les marques du cinéaste. On peut parler d'un grand film "naturaliste" au sens où l'entend Deleuze. Un univers y écrit avec force de détail, par l'incroyable reconstitution de l'Angleterre industrielle, montrant la couche noble et celle du peuple, avec l'hopital en son centre qui réunit les deux couches. L'arrivée de John Merrick l'homme-éléphant vient questionner la part d'animalité dans cette société : plus humain que nombre d'être dits "normaux" mais en fait monstrueux, Merrick est surtout un phénomène mystérieux qu'on ne peut soigner, visage surréaliste dans un univers que la science tente d'uniformiser (on ne garde pas les incurables dans l'hopital).

Lynch parsème le film de visions oniriques, donnant une force fantastique et surréaliste à cette histoire vraie.

vlcsnap-2017-03-16-16h11m36s519

Le spectacle "guimauve", la chanteuse en robe blanche trop souriante pour être honnête (qui renvoit aux chanteuses de Eraserhead, Blue Velvet, Twin Peaks, Mulholland drive) : un rappel des apparences du monde, et qui précède ici les applaudissements à la fois touchants mais condescendants du public envers John Merrick

vlcsnap-2017-03-16-16h12m04s654 vlcsnap-2017-03-16-16h12m29s237vlcsnap-2017-03-16-16h12m37s341

Le Magicien, maître du feu, et maître du bizarre : passage vers une autre réalité (celle de l'informe), ci-dessus dans Elephant Man

Source: Externe

et dans Mulholland drive

vlcsnap-2017-03-18-10h27m22s688 vlcsnap-2017-03-18-10h27m29s933vlcsnap-2017-03-18-10h27m38s596 vlcsnap-2017-03-18-10h27m46s384

La séquence d'introduction, montage surréaliste évoquant la pire atrocité (viol par un éléphant) sans la montrer tout à fait

vlcsnap-2017-03-18-10h32m13s098 vlcsnap-2017-03-18-10h32m18s651vlcsnap-2017-03-18-10h32m25s026

Le trou noir comme entrée ou sortie dans un autre monde, potentiellement le monde des rêves, ci-dessus dans Elephant Man

vlcsnap-2017-03-18-11h07m27s466

... dans Eraserhead

BlueBox

Dans Mulholland drive

vlcsnap-2017-03-18-10h32m51s971

La salle des machines des rêves, régie par des hommes mystérieux, ci-dessus dans Elephant Man

vlcsnap-2017-03-18-11h09m21s594

...dans Eraserhead

twinpeaks_internationalpilot_featured

... dans le pilote version longue de Twin Peaks

vlcsnap-2017-03-18-10h33m04s517

Elephant Man

Source: Externe

Fire Walk With Me

La fin, l'apaisement d'une longue peine

David Lynch semble toujours raconter l'histoire de personnages déjà morts, et revivre leurs peines à travers un labyrinthe de cauchemars. Au terme de la série Twin Peaks, obsédé par la morte Laura Palmer, il décide de lui redonner vie dans un film (là où Mark Frost aurait aimé un film sur la suite de la série, ce qui advenait à Dale Cooper). Il suit dans Fire walk with me le chemin de croix d'une jeune femme, qui passe du monde réel au monde des morts, et en chemin par le monde des rêves. Cette "formule" Lynchienne est reproduite dans Lost Highway (le voyage mystique d'un homme dans la peau d'un autre avant sa condamnation à mort) et Mulholland drive. Elephant Man suit aussi le calvaire d'un homme voué au supplice, qui sait qu'il mourra s'il s'endort allongé. Eraserhead semble (je dis bien, "semble" !) montrer l'impossible paternité d'un homme, tuant son enfant, avant de rejoindre l'au-delà et la chanteuse du radiateur dans une lumière blanche.

Peut-être Blue Velvet et Inland Empire montrent-ils des fins plus positives, de réunions familiales - quoique toujours teintées d'étrangeté, d'artificialité. Ces fins semblent être en tout cas celles de personnages vivants.

vlcsnap-2017-03-18-11h16m17s146

La fin mystique et appaisante, baignant dans une lumière irradiante, dans Elephant Man ci-dessus

vlcsnap-2017-03-18-11h09m12s701

dans Eraserhead

Source: Externe

dans Fire walk with me

Source: Externe

dans Mulholland drive

Les lieux, moteurs du cinéma de Lynch

Eraserhead et Elephant man, les deux premiers long-métrages de David Lynch, sont influencés par l'environnement de David Lynch jeune adulte lors de ses études d'art : la ville de Philadelphie. Un lieu de peur selon le cinéaste, qui l'influence dans la création d'un univers sombre, industriel, bruyant, dans ces deux films. 

vlcsnap-2017-03-18-10h51m01s261

Source: Externe

Twin Peaks et Blue Velvet baigneront dans l'influence des villages du Nord américain dans lesquels le cinéaste a passé son enfance.

Lost Highway, Mulholland drive et Inland Empire parcourent Los Angeles, ses rêves et ses cauchemars.

Sailor et Lula, Une histoire vraie, sont deux road-movie à travers l'Amérique.

Court-métrage "Lumière" de David Lynch

Court-métrage réalisé pour les 100 ans du cinématographe par David Lynch, avec l'une des caméras des opérateurs Lumière.

Freaks, faux monstre, vrai monstre

Source: Externe

Freaks,
de Tod Browning, 1932

Pour Gilles Deleuze, l'oeuvre de Tod Browning s'inscrit dans un concept d'image-cristal, où l'image cinématographique vient imprimer réel et virtuel "à la fois". Le film montre le passage du réel au virtuel, incessant, entre le rôle virtuel sur la piste du cirque et la réalité de l'acteur. Les "freaks" ont l'apparence monstrueux, mais sont en réalité très humains, comme le montre la première partie du film qui semble être la chronique réaliste de la vie d'un cirque, teintée de comédie amoureuse. Puis, on force les "monstres" "à passer dans leur rôle manifeste" (comme l'écrit Deleuze) : la monstruosité des êtres dits "normaux" (la blonde fatale qui prépare un crime), contamine les difformes qui deviennent à leur tour monstrueux. Ils finissent par devenir leur apparence, leur rôle virtuel. Deleuze conclue sur Browning en disant "ce qui apparaît chez Browning, c'est une double face de l'acteur, que le cinéma pouvait seul saisir en instaurant son propre circuit. L'image virtuelle du rôle public devient actuelle à son tour et remplace la première."

Source: Externe

 Nicolas le 18/03/2017, merci à Vivien !

Publicité
Publicité
Commentaires
Ciné-Club des Esthètes de la Rue Truffaut
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité